Le workcamp au sein de la Communauté de Gipsgrueb a été une expérience que je n’oublierai jamais. Au début je me disais que construire un mur était intéressant : une compétence en plus à rajouter dans mon parcours, et que j’aiderais quelqu’un qui a besoin de moi. Ce n’est pas comme ça qu’on contribue à un monde meilleur ? C’est surement comme ça, mais il s’agit d’une philosophie plus profonde qui va au-delà de n’importe quelle réflexion et/ou attente qu’on puisse avoir avant de devenir volontaire engagé.e.
S’engager équivaut à accepter que probablement pendant quelques jours ou semaines on vivra loin de ses commodités et qu’on devra renoncer au sentiment d’individualité afin de faire partie d’une équipe riche en diversité. Depuis le premier moment à Ehrendingen, on a compris l’importance de la communication pour instaurer un climat d’harmonie et tolérance qui nous a permis de travailler ensemble dans la même direction. Au final, Carla, Montse, Ha-Ngoc, Keita, Haruki, Anna-Stiina, Samuel et moi on provenait de contextes différents, mais on allait dans la même direction.
Grâce à ce niveau de compréhension, on a réussi à écouter les besoins de Michael, le partenaire de Gipsgrueb, et appris à travailler avec lui. Notre mission consistait principalement à restaurer un mur qui appartenait à une ancienne usine, mais la communauté avait également besoin de main d’œuvre pour déplacer un arbre récemment tombé. En plus, les trois premières journées il pleuvait sans cesser, et on nous a trouvé d’autres travaux à réaliser, dont le nettoyage d’une cave. Faire du bénévolat est aussi savoir s’adapter, ainsi que s’ouvrir aux changements qui puissent arriver en raison de conditions qui ne nous concernent pas (mauvais temps, faits imprévisibles, etc.). Je me suis sentie ravie de voir que malgré l’exigence du travail et la fatigue déjà évidente, tout le monde a toujours montré une bonne attitude.
Les moments libres étaient consacrés à la découverte de la région et de la culture locale. Après le travail on organisait souvent des activités comme la préparation d’une fondue, une excursion aux thermes de Baden, ou bien des balades nocturnes dans la forêt. Le weekend Michael nous a emmenés dans les montagnes de l’Oberland bernois en minibus : Meiringen, l’Aareschlucht, Rosenlaui, Schwarzwaldalp… et on est même arrivés aux 2 164 m au Col de Grimsel ! C’était touchant de remarquer qu’il était tout heureux de partager avec nous, une petite équipe internationale de bénévoles, les plus beaux endroits où il avait passé son enfance et adolescence.
Ces deux semaines où on a vécu humblement dans cette communauté à Ehrendingen se sont écoulées tellement vite que le dernier jour on avait du mal à croire qu’après toutes les expériences vécues, on allait très bientôt retourner à notre vie quotidienne. Et surtout que c’était probablement la dernière fois qu’on vivrait et travaillerait chez Gipsgrueb avec toutes les personnes qu’on avait rencontrées. Et c’est à ce moment-là, lors du dîner, qu’on discutait sur tous nos apprentissages, la chance qu’on avait eu de connaitre un style de vie si différent et naturel, les fruits et légumes du potager, les rencontres, les excursions, les anecdotes, les fois où on avait ajouté trop d’eau dans le ciment (ou pas assez)… Et d’un moment à l’autre, quelqu’un a dit « quand j’aurai des enfants, j’aimerais y revenir ; leur dire que j’ai contribué à la construction d’un mur qui appartenait à un bâtiment plein d’histoire, et que les voisins de Gipsgrueb en 2023 m’ont fait découvrir leur mode de vie, dont j’ai tellement appris. »
Faire du bénévolat avec SCI est bien plus que venir « aider » dans le cadre d’un camp de travail : c’est coopérer et collaborer. On établit une relation bilatérale et mutuelle, un exchange interculturel et intergénérationnel dont les bienfaits sont évidents sur le plan social, et à court et à long terme. C’est veiller à la paix en pensant global mais en agissant local, créer un espace de liberté, de sécurité et de justice dans un monde où il y a encore des guerres, des conflits et où le respect des droits de la personne n’est pas toujours garanti.
